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Voyage en Syntonie



Au cours de la domestication, l'homme n'a eu de cesse que de rendre le cheval extrêmement proche et docile pour l'utiliser dans nombre de tâches quotidiennes, en le soumettant par des méthodes musclées au besoin. Ce qui n’a pas empêché le cheval de garder ses instincts primaires profondément enracinés. Plus que tout autre, il perçoit et ressent les moindres vibrations qui émanent de son environnement.


Et si au lieu de le soumettre, nous nous laissions enseignés par lui ? Il devient alors un allié de taille pour nous aider à nous reconnecter avec notre nature profonde, là où se trouve tout ce qui est vivant en nous : j'ai nommé notre Être.


Voici un des aspects que je trouve tellement bénéfique pour le contacter dans une pratique dont le but est d'être librement consentie. Je vais faire de mon mieux pour ne pas vous perdre dans le voyage avec les explications ...

Au sein du troupeau, le cheval communique avec ses compagnons par des attitudes corporelles. Toutefois, vu la rapidité avec laquelle, par exemple, un groupe se met en mouvement ensemble, on peut se demander comment ça marche.


L'humeur syntone ou syntonie est celle observée chez un être vibrant en harmonie avec le milieu dans lequel il se trouve, en bref accordé sur la même longueur d'ondes avec son environnement instantané.


C’est l’histoire des neurones miroirs qui, à la vue d’un mouvement exécuté par un autre, déchargent dans les zones motrices un influx identique à celui qui interviendrait si on faisait le même mouvement. C’est ainsi qu’un cheval partant au galop entraîne les autres, que l’on voit des bancs de poisson tourner comme un seul homme … et que des mouvements de foule peuvent se produire ! Ca fonctionne de facto au sein d'une même espèce, mais également très bien inter-espèces : mettez une vache au milieu du troupeau des chevaux elle partira aussi au galop avec le leader …


Et bien l’équitation repose bel et bien sur cette empathie.


Et c’est là que ça devient intéressant pour nous ... car l'équitation librement consentie vise à développer cette capacité.


En effet, l’art de monter à cheval (l'équitation qui nous intéresse ici, sur le postulat de sans mors ni fers) consiste à faire comprendre -et non contraindre par la douleur du mors ou des éperons- au cheval dans quelle direction et à quelle allure on veut aller, à droite, à gauche, plus vite, reculer, au pas, au trot, au galop. Le langage de cet art repose pour une grande part sur le gestuel et utilise toutes les parties de mon corps pour accompagner le mouvement du cheval sans le déséquilibrer. Je me servirai de l’assiette, c’est-à-dire de la position de mon bassin dans la selle, un trépied ischium gauche et droit et périnée antérieur, avec un sacrum plus ou moins au contact. Je me servirai aussi des aides -le contraire de gênes-, qui sont essentiellement les jambes et les bras qui, par leur action ou leur passivité, orienteront le mouvement. C'est ainsi que "l'Etre Cheval" peut devenir un "Etre Equestre" respecté dans son intégrité et donc sa dignité.


Les notions d'équilibre (maîtrise de ma position par la gestion des déséquilibres) et d'harmonie (qualité d'un ensemble résultant de l'accord de ses parties et de leur adaptation à une fin) deviennent alors fondamentales.

Ici vous expérimentez dans l'ordre : apprendre à écouter et recevoir ... apprendre à gagner une certaine maîtrise dans le but de ne pas gêner ... et seulement ensuite envisager d'intervenir. Prendre le temps nécessaire pour apprendre à ne pas gêner mon cheval ne ressemble en rien à des "vacances" (venez l'expérimenter si vous en doutez !) ; par contre, c'est accorder à mon cheval le temps pour qu'il s'équilibre de lui-même avec ma présence dans le but d'y trouver du confort. Le BA-ba d'un chemin vers la sensibilité intime pour tourner le dos à "l'obliger à" .


Pour cela, je me sers beaucoup de mon corps qui, par des mouvements parfois très fins va pouvoir orienter -et non contraindre !- le mouvement du cheval dans le sens souhaité.


Le pas est souverain pour prendre contact avec mon véhicule terrestre -si souvent oublié-, parce que l'allure est suffisamment lente pour permettre de ressentir. Et enrichir sa pratique de sensations mène à un partenariat de légèreté qui ne peut exister que si l'humain accroît suffisamment son acuité corporelle.


Comment ?


Une première étape est d'être cavalier passif : sur un cheval au pas, je perçois qu’en même temps qu'il avance son postérieur gauche, mon iliaque gauche et sa jambe gauche avancent aussi. Puis, quand l’antérieur gauche va à son tour avancer, obligeant l’encolure à dévier légèrement sur la droite dans un souci d’équilibre, ma main posée sur la rêne gauche s’avance et entraîne avec elle mon épaule gauche. Je ressens alors en moi un mouvement alternatif à quatre temps identique à celui du cheval : avancée du bassin gauche, de l’épaule gauche, du bassin droit, et de l’épaule droite.


Lorsque je deviens un cavalier actif, je peux, à partir des mouvements intégrés, suggérer à mon cheval :

  • D'accélérer en augmentant progressivement l’amplitude et la vitesse d’exécution de l’alternance de mon mouvement de bassin.

  • De ralentir en diminuant de même amplitude et vitesse de mon bassin.

  • De tourner en agissant sur mon centre de gravité.

  • De resserrer ou élargir le cercle en jouant sur le déplacement de mon centre de gravité.

C'est possible seulement quand je quitte "l'être qui n'existe pas" (mes persona, mes masques, mon mental, l'idée que je me fais de moi, et mon image) pour contacter "l'être réel" : "Je n'ai d'autre ambition que d'être ce que je veux être, et non le paraître" (Romain Rolland)


Il se dégage la notion d’homologie gestuelle entre les différentes parties du cheval et les miennes, ainsi que la notion de rattrapage d’équilibre : quand j'induis une perturbation, le cheval harmonise de lui-même afin de retrouver la cohérence entre les deux gestes dans un souci de confort dans une moindre tension. Ce qui est ici valable au pas est valable pour toutes les allures et attitudes et représente un principe général théorisé sous le nom d’isopraxie, mis en valeur par JC. Barrey.


Pour que cela soit pendant le temps de la pratique équestre, le cheval doit oublier ses états de tension et de désir, pour substituer, de son plein gré, à ses nécessités (repos, jeu, subsistance) celles du cavalier qui est sur son dos. Et ça fonctionne également très bien au sol comme le montre la vidéo.


Cela nécessite aussi que le cheval soit dans un état psychologique particulier qu’on appelle un champ détendu : il peut alors substituer temporairement à sa dynamique d’origine endogène, une dynamique tout à fait semblable, mais d’origine exogène, celle suggérée par le cavalier. Autrement dit, si le cheval est dans cet état de bien-être, il peut alors décider de répondre favorablement aux demandes du cavalier, mettant temporairement de côté ses envies, non pas pour soulager un besoin mais bel et bien parce qu'il est disponible et le décide !


Sans oubliée la part humaine, trop souvent oubliée en pratique équestre. Je ne parle pas de technique mais bel et bien d'un état qui me met également en état de réceptivité de mon environnement immédiat, dont le cheval fait partie, pour pouvoir émettre des demandes et des réponses ajustées, en terme de précision, intensité et à propos, aux questions posées par le cheval dans ses comportements.


Comment créer les conditions de ce fameux champ détendu ?


Chez le cheval : pour nous ici, indiscutablement en lui procurant des conditions de vie favorisant ses comportements naturels, comme :

  • De l'eau à disposition, du foin à volonté (faut-il rappeler que la base de son alimentation est les fibres), des aires d'évolution spatieuses et des abris naturels ou construits.

  • Une vie sociale aussi riche que possible, indispensable à son équilibre, garantie par la vie en groupe.

  • Un mode de vie en harmonie avec sa nature d'herbivore proie, un rythme de vie régulier.

  • Et des séances variées avec les humains où sa disponibilité est recherchée au lieu de la performance, afin qu'il adhère à son rôle d'enseignant.

C'est pour cette raison que nous avons choisi -et réussi à mettre en place après plusieurs années de prés conventionnels- les équi-pistes, qui se sont transformées en Equi-Jardin ; avec des fleurs, des arbres (fruitiers ou pas), des végétaux variés notamment qui éloignent les insectes à proximité des zones identifiées comme celles du repos ou de l'alimentation, c'est carrément plus ressourçant pour chevaux et humains !


Chez l'humain, c'est à la fois très simple et donc difficile à réaliser car il s'agit de descendre de notre tête pour débarquer dans notre corps. Et que ça fait du bien, passé l'inconfort du début parce que nous n'en avons pas l'habitude.


Et sinon, à quoi ça sert ?


A ressentir intensément tout ce qui est vivant en nous … pour ouvrir en nous de nouvelles formes de conscience plus créatives menant tout droit à Être et Exister.


Les intentions, pensées et émotions sont de l'information et de l'énergie impalpable auxquelles nous sommes les uns les autres réceptifs et sensibles, tout autant qu'émetteurs. Mon 6e sens, intuition, me transmet par des sensations corporelles et sentiments ce décodage subtil ... mon bien-être tout autant que mes malaises ont souvent des origines invisibles car non conscientisées. Pour autant, tout mon corps sait avant ma tête "qu'il se passe quelque chose". Devenir conscient de ce quelque chose, c'est aussi devenir attentif à mon niveau d'énergie et développer ma "réponse-habileté" dans les situations vécues, et reprendre le pouvoir sur ma vie. A commencer par les relations avec moi-même qui impacte considérablement celles avec les autres.


Un long discours est inutile, venez l'expérimenter ! De l'avis de celles et ceux qui le font, le voyage en syntonie vaut le détour ... Profondément ressourçant.


Martine


Bibliographie :

  • Oscillateurs Neuronaux, Isopraxie, Intersubjectivité, Empathie... par P. Chêne, 19/12/2018

  • Sylvie Liger, Nouvelle Perspective, 56000 Vannes

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